L’Église, communion de vie, de charité et de vérité pour le Salut du Monde

 

Trentième dimanche du temps ordinaire, 29 octobre 1978; Lectures : Exode 2,21-27; Thessaloniciens 1,5c-10; Matthieu 22,34-40.

 

Dans les lectures d’aujourd’hui (Ex 2,21-27; Th 1,5c-10; Mt 22,34-40) il me semble rencontrer un magnifique rĂ©sumĂ© d’un des textes les plus denses du Concile Vatican II quand il parle de l’Église comme peuple messianique (L.G.9) : « Ce peuple messianique, s’il ne comprend pas effectivement tous les hommes et n’apparaĂ®t parfois que comme un petit troupeau, n’en subsiste pas moins au sein de toute l’humanitĂ© comme un germe très fort d’unitĂ©, d’espĂ©rance et de Salut. Établi par le Christ en communion de vie, de charitĂ© et de vĂ©ritĂ©, il lui sert d’instrument pour la RĂ©demption de tous et il est envoyĂ© au monde entier comme lumière du monde et sel de la terre (cf. Mt 5,13-16). Â»

 

C’est ce que nous sommes, c’est ce que nous devons être si nous voulons vraiment construire l’Église. Je voudrais ratifier que la raison de ma prédication, que la raison d’être de nos réunions et de nos réflexions chrétiennes autour de la Parole de Dieu, possède cette finalité, que chaque jour nous nous constituons davantage comme Peuple de Dieu comme disciples du Christ, nous sentant véritablement comme un germe très fort d’unité, d’espérance et de Salut. Que le monde, que notre patrie, sache reconnaître dans les groupes chrétiens non pas des gens suspects, mais au contraire, des personnes qui soient vraiment Lumière du Monde et Sel de la Terre.

 

C’est pourquoi j’aime savoir concrètement quelle est cette communauté qui est en train de participer à la réflexion de ce matin. Ce n’est pas une communauté chrétienne réunie dans une église d’Europe ou d’Afrique ou d’un autre pays de notre continent, c’est l’Église d’ici, de l’archidiocèse de San Salvador, dans cette Cathédrale. Et ce sont aussi ces communautés qui se réunissent là-bas dans les chapelles et qui écoutent cette messe à la radio pour la méditer. Ce sont les communautés de tel ou tel canton, de tel hameau. Dans ce cas, nous devons sentir cette communauté avec ses réalités de joie et de tristesse. C’est ici que j’ai plaisir à faire avec vous un bilan de joie et d’espérance pour que nous sentions tous cette communion de vie, d’amour et de vérité. Pour que nous partagions notre sentiment d’être des Salvadoriens chrétiens ou de ceux qui sans être Salvadoriens, se sont identifiés à notre communauté et qui vivent pleinement dans cette Église.

 

Observez bien comment le Concile ne se fait pas d’illusion de ce que l’Église sera. Elle ne sera pas la totalitĂ© du peuple, souvent elle peut ĂŞtre rĂ©duite Ă  un tout petit groupe et c’est ainsi que le Christ le disait Ă  ses disciples : « N’ayez pas crainte, petit troupeau Â» (pusillus grex). Une expression tendre du Seigneur pour nous dire de ne pas croire que c’est tout le monde qui va accepter cette parole, mais qu’il y aura toujours un groupe, mĂŞme rĂ©duit. Que ce groupe demeure dans la joie, disait-Il, parce que le Père vous dĂ©sire et qu’Il vous donnera son Royaume. Vous ĂŞtes le germe de l’unitĂ© et du Salut du monde, vous ĂŞtes l’espĂ©rance. Oui, très chers frères, soyons en vĂ©ritĂ© des communautĂ©s chrĂ©tiennes qui soient saintes, disciples du Christ, remplies d’espĂ©rance et unies dans l’amour. Nous ne prĂ©tendons pas Ă  la gloire des grandes foules, mais Ă  la soliditĂ© d’un amour et d’une vie qui nous vient de Dieu. 29/10/78, p.259-260, V 4.

 

 

Plan de l’homĂ©lie :

1) Communauté de Vie

2) Communauté de Vérité

3) Communion de Foi

4) Communauté de Charité

 

 

1) Communauté de Vie

 

Je vais vous lire ce passage du Livre des Actes des Apôtres pour que vous voyiez que ce qui se passe actuellement dans nos communautés chrétiennes, ici dans l’archidiocèse, est l’histoire de toujours. La communauté de Thessalonique est née peut-être quinze ou vingt ans après l’Ascension du Seigneur. Les épîtres aux Thessaloniciens sont les premières lettres du Nouveau Testament. C’est une communauté nouvelle, pourrions-nous dire. Souvenez-vous d’il y a vingt ans, plusieurs ne connaissent pas ce qui s’est passé il y a vingt ans, en 1958, il en était de même à Thessalonique. Plusieurs personnes avaient connu et entendu de la bouche même des apôtres le récit du passage du Fils de Dieu fait homme, qui est mort sur la croix, qui est ressuscité et que croire en Lui donnait le Salut.

 

Ceux qui le virent de si près Ă  JĂ©rusalem, les Juifs, ne le comprirent pas. Ce fut un petit groupe qui adhĂ©ra au Christ. C’est pour cela que les apĂ´tres prirent la dĂ©cision d’aller annoncer la Bonne Nouvelle au-dehors de la Palestine, parce que lĂ  les gens Ă©taient dans l’attente de cette nouvelle. C’est ici que cela se produisit selon le Livre des Actes (17,5) : « Mais les Juifs, pris de jalousie, ramassèrent sur la place quelques mauvais sujets, provoquèrent des attroupements et rĂ©pandirent le tumulte dans la ville. Ils se prĂ©sentèrent alors Ă  la maison de Jason, cherchant Paul et Silas pour les produire devant l’assemblĂ©e du peuple. Â» Ce Jason Ă©tait un chrĂ©tien rĂ©cemment converti qui donnait l’hospitalitĂ© Ă  Paul et Ă  Silas parce qu’ils avaient Ă©tĂ© chassĂ©s de la Synagogue, c’est-Ă -dire du temple officiel oĂą Paul avait commencĂ© Ă  enseigner aux Juifs. Ils ne voulurent plus le recevoir et ils lui dirent : « Tu ne peux plus enseigner ici parce que ta doctrine est contraire Ă  nos traditions. Â»

 

Ces lieux de rĂ©unions sont semblables Ă  celles que nous ont enlevĂ©es ces usurpateurs qui mettent Ă  la porte les chrĂ©tiens. Paul, avec son groupe de chrĂ©tiens, s’en alla Ă  la maison d’un ami, Jason et c’est lĂ  que les autoritĂ©s religieuses vinrent pour le faire comparaĂ®tre devant le peuple. Devant les magistrats ils crièrent (Ac 17,6-7) : « Ces gens qui ont rĂ©volutionnĂ© le monde entier, les voilĂ  maintenant ici, et Jason les reçoit chez lui. Tous ces gens-lĂ  contreviennent aux Ă©dits de CĂ©sar en affirmant qu’il y a un autre roi, JĂ©sus. Â»

 

À quoi cela vous fait-il penser? N’est-ce pas comme cela se produit actuellement envers ceux qu’on accuse d’être subversifs, d’être contre l’autorité, ceux qui doivent être emprisonnés? N’est-ce pas étrange que l’histoire de nos communautés soit une histoire de persécution. Chaque fois que les chrétiens ont tenté d’affirmer véritablement que Jésus est Roi et Seigneur, et que nous avons voulu proclamer son Évangile comme unique Parole du Salut, chaque fois que nous avons dénoncé, à partir de la Parole de Dieu, tous les abus du pouvoir du monde, les persécutions ont surgi.

Ils emprisonnèrent Jason et ils exigèrent une forte caution avant de le relâcher, nous rapporte le Livre des Actes des ApĂ´tres. Mais aussitĂ´t après, nous raconte saint Paul dans son Ă©pĂ®tre aux Thessaloniciens, ce que vous avez entendu aujourd’hui (Th 1,5c-10) quel Ă©loge plus merveilleux (6-8) : « Vous vous ĂŞtes mis Ă  nous imiter, nous et le Seigneur, en accueillant la Parole, parmi bien des tribulations, avec la joie de l’Esprit saint : vous ĂŞtes aussi devenus un modèle pour tous les croyants de MacĂ©doine et d’AchaĂŻe. De chez vous en effet, la Parole du Seigneur a retenti de tous cĂ´tĂ©s, votre foi en Dieu s’est si bien rĂ©pandue que nous n’avons plus besoin d’en rien dire. Â» Voyez, une communautĂ© de vie. C’est cela l’Église, une communion de vie. C’est parce que les motifs qui nous rĂ©unissent maintenant dans la cathĂ©drale, dans nos chapelles, dans nos rencontres chrĂ©tiennes, ce n’est pas pour nous souvenir d’un mort. Ils sont pauvres les chrĂ©tiens qui croient que leur religion n’est qu’un musĂ©e de souvenir et qui ne cherchent qu’à la conserver sans lui faire courir de risque. Non, frères, la communion de l’Église c’est la vie, c’est une communion de vie qui doit ĂŞtre confrontĂ©e avec la vie du monde actuel. Elle est vie, ses lois, ses dogmes, ses croyances doivent se convertir en vie.

 

Celui qui ne veut pas comprendre ainsi la religion de l’Éternel Vivant, du Christ qui ne mourra jamais, d’un Dieu Vivant qui va accompagner le peuple et qui dit dès la première lecture d’aujourd’hui (cf. Ex 2,23-24) : « Ne commettez pas l’injustice, parce que ce pauvre, cette victime de l’usure ou du prĂŞt injuste, clame vers le ciel et Je l’entendrai. Â» Je suis le Dieu Vivant.

 

Notre religion est Vie et c’est lĂ  le plus merveilleux que je voudrais que vous reteniez. Je voudrais Ă©galement rendre grâce Ă  Dieu parce que cette prĂ©dication de la religion comme une vie est ce qui a donnĂ© Ă  plusieurs qui Ă©taient morts dans la foi, la RĂ©surrection et la Vie. Cela vaut la peine de croire, d’aller Ă  la messe le dimanche et de s’y alimenter de la Parole de Vie, non pas pour ce que les autres en disent, mais parce que je suis du Christ, le Vivant par excellence. Alors, courage, très chers frères et sĹ“urs, je sais que pour plusieurs est arrivĂ©e l’heure de l’épreuve et que plusieurs ont fui lâchement : catĂ©chistes, cĂ©lĂ©brants de la Parole, des gens qui partageaient avec nous les joies de nos rĂ©unions et qui ont Ă©tĂ© effrayĂ©s. Des personnes que nous croyions très fortes sont dans la peur, c’est parce qu’elles ont oubliĂ© qu’il s’agit d’une religion de vie et qui en tant que telle se doit de se heurter avec ce qui n’est pas la vie de Dieu, ce qui vit dans le règne de tĂ©nèbres et du pĂ©chĂ© du monde. 29/10/78, p. 264-265, V.

 

 

2) Communauté de Vérité

 

Un autre aspect de la communion de l’Église, c’est que cette dernière en est une de vĂ©ritĂ©. Il est bon de savoir que notre foi chrĂ©tienne est la VĂ©ritĂ©. Aucun homme ne peut se dire propriĂ©taire de la VĂ©ritĂ©, personne n’est infaillible, seul Dieu. Mais lorsqu’un homme croit en Celui qui est la source de la VĂ©ritĂ© et s’y abandonne, c’est un homme de foi, cet homme a la VĂ©ritĂ© mĂŞme s’il ne la comprend pas, par le fait mĂŞme qu’il l’a acceptĂ©e. Je voudrais que tous mes chers auditeurs soient des hommes et des femmes de foi auxquels saint Paul pourrait dire comme il disait aux chrĂ©tiens de Thessalonique : « Je connais l’activitĂ© de votre foi, la foi est active parce que la foi est la Vie. Â» Je voudrais que nos communautĂ©s soient comme ce qu’en dit saint Paul de Thessalonique (1,8-10) : « Votre foi en Dieu s’est rĂ©pandue, si bien que nous n’avons plus besoin de n’en rien dire. On raconte lĂ -bas comment nous sommes venus chez vous, et comment vous vous ĂŞtes tournĂ©s vers Dieu, abandonnant les idoles pour servir le Dieu vivant et vĂ©ritable, dans l’attente de son Fils qui viendra des cieux, qu’Il a ressuscitĂ© des morts, JĂ©sus, qui nous dĂ©livre de la colère qui vient. Â»

 

Une communauté chrétienne s’évangélise pour évangéliser. Une lumière s’allume pour éclairer, on ne l’allume pas pour la mettre sur le boisseau, disait le Christ. On l’allume et on la met bien haut pour qu’elle éclaire toute la maisonnée. C’est cela une communauté véritable. Une communauté est un groupe d’hommes et de femmes qui ont rencontré dans le Christ et dans son Évangile la Vérité et qui la suivent et s’unissent pour s’y consacrer toujours davantage. Ce n’est pas simplement une conversion individuelle, c’est une conversion communautaire, c’est une famille qui croit, c’est un groupe qui accepte Dieu. Et comme groupe, chacun sent que l’autre le fortifie et que dans les moments de faiblesse, ils s’aident mutuellement. Ils s’aiment et ils croient, donnant de la lumière, de telle sorte que le prédicateur n’a déjà plus besoin de prêcher quand les chrétiens font de leur vie une prédication. […]

 

Dans ce passage de l’épĂ®tre aux Thessaloniciens il y a trois choses que nous devons retenir. Premièrement, le monothĂ©isme, c’est-Ă -dire renoncer Ă  toutes les idoles pour croire dans le Dieu unique. Deuxièmement, une christologie, un Fils de Dieu qui se fit homme qui s’appelle le Christ et dans lequel nous croyons parce qu’Il est mort et qu’Il est ressuscitĂ©. Et, troisièmement, une eschatologie, un au-delĂ , une attente du Fils du Dieu vivant dans l’éternitĂ© qui viendra juger les vivants et les morts et qui condamne dĂ©jĂ  le pĂ©chĂ© en ce monde et qui le condamnera lorsqu’Il dira : « Allez, maudits, au feu Ă©ternel Â», Ă  tous ceux qui ne voulurent pas se convertir en vĂ©ritĂ©.

 

C’est lĂ  le rĂ©sumĂ© du contenu de notre foi : La communion en vĂ©ritĂ© contient ces trois grandes vĂ©ritĂ©s : croire dans l’unique Dieu vĂ©ritable et pour Celui-ci, renoncer Ă  tous les faux pouvoirs. Vous souvenez-vous dimanche dernier lorsque Jean-Paul II parlait prĂ©cisĂ©ment du pouvoir de la tiare, qui est le pouvoir du Christ que tout le peuple de Dieu doit porter. Il disait donc : « Ouvrez les portes Ă  cette puissance du Christ, n’ayez pas peur, ouvrez-Lui les champs de l’économie, de la politique et du social. Â» Ne dites pas que le Pape ne parle pas de politique, alors qu’il dit d’ouvrir au Christ le champ de la politique. Celui-ci va prĂŞcher son Règne Ă  la politique, sans quoi celle-ci se convertit en ce terrible drame de l’homme qui devient un loup pour les autres. Seul le Christ peut donner un sens humain Ă  la relation du capital et du travail. Seul le Christ peut donner une relation d’humanitĂ©, de comprĂ©hension. Maintenant que l’heure arrive des rĂ©coltes des fruits de notre terre, cela devrait ĂŞtre pour le bonheur de tous ceux qui naissent sur cette terre. Dans le sens chrĂ©tien que nous a rapportĂ© la première lecture des privilĂ©giĂ©s et des pauvres, afin que nous sachions rĂ©partir avec Ă©quitĂ© et justice ce que Dieu a crĂ©Ă© pour tous. […]

 

L’Observatore Romano nous rapporte ce commentaire du cardinal Wojtyla : « Il existe certainement en ce monde une grande charge de foi – il existe une marge considĂ©rable de libertĂ© pour la mission de l’Église – disait le Cardinal – mais bien souvent il ne s’agit que d’une marge. Il suffit d’observer les principales tendances qui prĂ©valent dans les mĂ©dias de communication sociale, il suffit de prĂŞter attention Ă  ce qui est passĂ© sous silence et ce qui est dit Ă  haute voix. Il suffit d’affiner son oreille pour percevoir ce qui rencontre l’opposition la plus grande et pour voir que lĂ  Ă©galement, oĂą le Christ est acceptĂ©, il y a en mĂŞme temps une opposition envers ce qui Ă  trait Ă  la vĂ©ritĂ© pleine et entière de la personne du Christ, de sa mission et de son Ă©vangĂ©lisation. C’est comme si on cherchait Ă  le modeler, Ă  l’adapter sur mesure Ă  nos dimensions humaines, de l’ère du progrès et au programme de la civilisation moderne qui en est une de consommation et non de fins transcendantes. Il existe une opposition au Christ Ă  partir de ces attitudes et on ne supporte pas la vĂ©ritĂ© proclamĂ©e et rappelĂ©e en son nom. Cette opposition au Christ, en mĂŞme temps qu’elle y fait rĂ©fĂ©rence, inclusivement de la part de ceux qui se disent ses disciples, est un symptĂ´me significatif des temps dans lesquels nous vivons. […]

 

Le Concile Vatican II fait Ă©galement mention de l’athĂ©isme (G.S.19,3) : « Dans cette genèse de l’athĂ©isme, les croyants peuvent avoir une part qui n’est pas mince, dans la mesure oĂą, par la nĂ©gligence dans l’éducation de leur foi, par des prĂ©sentations trompeuses de la doctrine et aussi par des dĂ©faillances de leur vie religieuse, morale et sociale, on peut dire d’eux qu’ils voilent l’authentique visage de Dieu et de la religion plus qu’ils ne le rĂ©vèlent. Â» Si le communisme est athĂ©e, ne soyez pas Ă©tonnĂ© d’entendre que le capitalisme est quant Ă  lui un athĂ©isme pratique, et s’il accorde une marge Ă  la foi, c’est une marge rien de plus. Et parlant de cette forme historique d’opposition au Christ, dans laquelle ont une grande part de responsabilitĂ© ce faux christianisme de ceux qui dĂ©fendent davantage leur Ă©goĂŻsme que le propre Christ, le cardinal Wojtyla continue en disant : « C’est lĂ  une forme d’opposition directe au Christ. Â» Voyez que l’Église n’est pas communiste. Ce Cardinal a longtemps vĂ©cu sous le rĂ©gime communiste, et je dis Ă©galement cela Ă  partir des exigences de la justice sociale de l’Église, que le communisme est une forme d’opposition directe au Christ, un rejet ouvert de l’Évangile, une nĂ©gation de la vĂ©ritĂ© de Dieu sur l’homme et sur le monde que l’Évangile proclame. Cette nĂ©gation assume parfois des caractères de brutalitĂ©s. Mais parfois on se demande : oĂą se trouve l’opposition la plus brutale? J’ai su qu’il existe encore des pays oĂą les Ă©glises de toutes confessions sont fermĂ©es, oĂą les prĂŞtres sont condamnĂ©s Ă  mort pour avoir administrĂ© le baptĂŞme. Chez nous, certains prĂŞtres ont Ă©tĂ© assassinĂ©s pour avoir prĂŞchĂ© la justice sociale.

 

Quelle différence y a-t-il entre ce monde et le nôtre? Qui sait, peut être qu’en ces pays il existe encore des catacombes chrétiennes et des cirques où les témoins du Christ étaient lancés aux fauves pour être dévorés. Cependant, la persécution contemporaine, typique des dernières années du XXe siècle, offre un panorama complètement distinct de l’ancienne, elle possède une signification tout à fait différente. 29/10/78, p.265-268, V.

 

 

3) Communion de Foi

 

Comme est belle, cette méditation du cardinal Wojtyla, mais ces deux pensées ne suffisent pas pour que vous voyiez, chers frères, que si notre Église – et c’est là ma conclusion – si notre Église est communion de foi, ne vous laissez pas tromper par les petites marges de foi et de liberté que veulent bien nous laisser certains systèmes qui se prétendent protecteurs de l’Église. Si nous sommes vraiment une communion de foi, nous ne devons pas être satisfaits tant que nous ne sentirons pas que cette foi est vie et que nous la portons dans notre vie, sans peur des situations, quelles qu’elles soient.

 

Le cardinal Wojtyla rappelle les temps des catacombes et des cirques des martyrs, il nous remémore également, lui qui l’a vécu dans sa propre chair, les prisons du marxisme. À nous également il nous arrive de vivre l’emprisonnement et les tortures du système capitaliste. Ce qui importe c’est qu’en n’importe quel système, la foi dans le Christ soit la torche qui donne la sérénité, la valeur et l’espérance à cette vie. 29/10/78, p.268, V.

 

 

4) Communauté de Charité

 

Et finalement la communion de la CharitĂ©. Je l’ai gardĂ©e pour la fin parce que les lectures d’aujourd’hui Ă©taient suffisamment explicites. La première lecture de l’Exode, celle de ce livre de l’Alliance, oĂą Dieu Ă©tablit une alliance avec les hommes et les femmes. « Je serai votre Dieu et vous serez mon peuple Â», mais comme dans toute alliance, il y a des conditions. Et suivent alors un ensemble de lois que vous pourrez lire dans ces chapitres de l’Exode. Je m’attarderai ici uniquement aux lois sociales (Ex 22,20-22) : « Vous n’opprimerez pas ni n’abandonnerez l’étranger parce que vous avez Ă©tĂ© vous-mĂŞmes des Ă©trangers en Égypte. Vous n’exploiterez pas la veuve et l’orphelin parce que si vous les exploitez, ils se lamenteront et Je les entendrai. Â» Quel argument plus terrible! Tout ce que vous faites Ă  un pauvre, le Christ le vit. Comme m’a Ă©mu l’affliction de cette pauvre veuve du gardien d’un poste d’essence qui est mort assassinĂ©, comment elle a tentĂ© de sauver son mari. Ces fils croyaient qu’il Ă©tait encore en vie dans un hĂ´pital, mais ils apprirent qu’il avait Ă©tĂ© enterrĂ© près de Suchitoto. C’est cela, la clameur des veuves et des orphelins qui clament vers Dieu et Dieu ne demeurera pas sourd : « Ma colère s’enflammera et Je ferai mourir par l’épĂ©e ceux qui ont fait ces veuves et ces orphelins. Â» La Bible est terrible. […] « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cĹ“ur, de tout ton ĂŞtre et de toute ta volontĂ© et le second commandement est semblable Ă  ceci : tu aimeras ton prochain comme toi-mĂŞme. Â»

 

Frères, l’original du Christ ce n’est pas d’avoir prononcĂ© des paroles que tout Juif savait dĂ©jĂ  et disait comme une profession de foi dans la fameuse Sema. Ce mot hĂ©breu signifie « Ă©coute Â», parce qu’il commence en disant : « Ă‰coute IsraĂ«l, il n’y a qu’un seul Dieu. Â» Dans ce fameux texte de la Sema, le Christ nous rappelle que Dieu est le principal. En cela, le Christ ne diffère pas des autres juifs, Il rappelle ce que dit la Bible. Mais ce qui est original chez le Christ c’est, ne l’oublions pas, qu’avec ce prĂ©cepte de poids, principal, « Tu aimeras ton Dieu Â», Il mit sur le mĂŞme niveau : « et ton prochain comme toi-mĂŞme. Â» C’est ce qui est original du christianisme, que la mĂŞme motivation avec laquelle tu aimes Dieu, doit ĂŞtre celle avec laquelle tu aimes ton prochain. C’est cela, la caractĂ©ristique de l’Évangile, c’est le commandement nouveau que le Christ redit au moment oĂą Il fait ses adieux : « Aimez-vous les uns les autres comme Je vous ai aimĂ©s. Â» Parce que Je n’ai pas seulement aimĂ© le Père de tout mon cĹ“ur, car par amour pour Lui, Je vous ai aimĂ© aussi jusqu’au point de donner ma vie. C’est cela qui est original dans notre foi. Frères, il est très facile de dire, comme une Ă©vasion : je vais Ă  l’Église pour adorer Dieu et peu m’importe mon prochain. C’est la parabole du Bon Samaritain. Un prĂŞtre et un LĂ©vite, des hommes d’Église, ne firent rien parce qu’ils devaient aller prier au temple, ils laissèrent abandonner le pauvre blessĂ© et en cela ils ne furent pas les prochains du Christ. 29/10/78, p. 269-270, V.