La Vierge du Carmel
16 juillet 1977; Lectures :
Zacharie 2,14-17; Luc 2,15b-19.
1) La Vierge nous offre une promesse
de Salut
Je tiens d’abord à dire que le
scapulaire de la Vierge du Carmel est un signe de l’espérance que porte chacun
en son âme, en son cœur, dans sa vie. Celui qui meurt en la portant ne verra
pas les flammes de l’enfer. Mais je voudrais en détromper plusieurs et leur
dire qu’il ne s’agit pas là d’une fausse promesse, c’est-à -dire qu’elle ne
s’appuie pas sur notre propre réalité. La promesse de la Vierge veut éveiller
dans le cœur de chacun ce sentiment eschatologique, c’est-à -dire cette promesse
de l’au-delà : travaillez sur cette Terre avec l’âme et le cœur tournés
vers le Ciel en sachant que personne ne peut s’installer définitivement en ce
monde, sinon que nous sommes des pèlerins en route vers l’éternité, en nous
souvenant que les choses de la Terre passent, que l’éternel est ce qui demeure.
C’est cela, avant tout la transcendance!
La Vierge, comme l’Église, comme le
Christ, nous offre un message transcendant et c’est ce qui donne à l’Église son
originalité que ne possède aucune autre promesse de libération. […] L’Église
veut un monde meilleur, mais elle sait que la perfection ne se réalisera jamais
dans l’histoire, qu’elle se situe au-delà , ce Salut d’où nous vient la Vierge,
cette destinée céleste où notre mère nous attend, cette destinée en ce paradis
d’où trouve son origine le scapulaire, lien qui nous rattache à cette éternité.
Personne ne porte le scapulaire en ne pensant qu’aux paradis de la Terre, au contraire,
en pensant au Salut éternel, où après ma mort je vais être sauvé. Cela est très
bien, cultivons cela, ne perdons pas de vue ce premier message de la Vierge, la
spiritualité.
Et lorsque le Saint-Père, recueillant
l’opinion de tous les évêques du monde, exprimée au Synode de 1 974,
écrivit cette fameuse exhortation sur l’évangélisation du monde actuel, le Pape
dit qu’il entendit, dans la voix des évêques, la clameur des immenses misères
du monde. Et les pères et le Pape parlent de libérer le monde de ces misères.
Mais, le Pape insiste Ă©galement, avec les Ă©vĂŞques, sur le fait que les
prémisses du Salut chrétien sont spirituelles, célestes et éternelles. Que
jamais un homme qui travaille pour la libération sur la Terre, n’oublie cette
espérance du Ciel. Frères, réaffirmons ce matin notre espérance de ce Ciel
auquel fait si explicitement référence le saint scapulaire de la Vierge,
portons-le toujours, ayant à l’esprit qu’en cette éternité, nous demandera des
comptes sur le travail que nous aurons fait sur Terre. 16/07/77, p.131-132,
I-II.
2) Un Salut qui nous réclame de
travailler dans l’Histoire
Le scapulaire nous engage aussi
envers cette Terre, dans l’accomplissement des devoirs de ce monde. C’est ce
que l’Église accentue actuellement. Lorsqu’elle réclame une société plus juste,
une meilleure distribution des richesses, une politique plus respectueuse des
droits de l’homme, l’Église ne se mêle pas de politique, ni n’est devenue
marxiste communiste. L’Église dit aux hommes la même chose que le scapulaire :
« Seul sera sauvé celui qui sait user des biens de ce monde avec le cœur
de Dieu. » En ce moment, il existe de nombreux injustes, il se produit
beaucoup d’outrages à la dignité humaine et plusieurs injustices envers les
pauvres et ceux-ci en commettent eux-mĂŞmes envers le riche. Il existe de
nombreuses situations de péché.
C’est ainsi qu’en parlèrent les
Ă©vĂŞques autorisĂ©s par le Pape rĂ©unis Ă MedellĂn, en AmĂ©rique, il existe une
situation de péché, une injustice qui fait presque partie des mœurs et il est
nécessaire que les chrétiens s’emploient à transformer cette situation de
péché. Le chrétien ne doit pas tolérer que l’ennemi de Dieu, le péché,
règne en ce monde. Le chrétien doit travailler afin que le péché soit
marginalisé et pour que le Règne de Dieu s’implante. Lutter pour cela ce n’est
pas du communisme. Lutter pour cela ce n’est pas se mêler de politique. C’est
simplement l’Évangile qui réclame à l’être humain, au chrétien d’aujourd’hui,
de s’engager davantage dans l’Histoire. 16/07/77, p.132-133, I-II.
Obligation de travailler pour le bien
Le Concile dit : « Tous
ceux qui ne travaillent pas dans l’accomplissement fidèle de la loi de Dieu,
dans la gestion des choses temporelles, offensent Dieu. » Il offense
également l’amour du prochain. Est paresseux celui qui ne fait rien pour son
prochain et il met en danger son propre Salut. Il existe ici non seulement le
danger du purgatoire, mais aussi celui de l’enfer, pour celui qui pouvant faire
le bien ne le fit pas.
Ce sont les BĂ©atitudes que la Bible
dit de ceux qui se sauvent, des saints, parce qu’ils purent commettre le mal et
ne le firent pas. Au contraire, on dira de celui qui se condamne : Il put
faire le bien, mais par Ă©goĂŻsme, il ne le fit pas, il eut entre ses mains le
pouvoir de changer les destinées de la république, de la rendre heureuse, plus
juste, plus pacifique, mais il n’en fit rien. Tous ceux qui eurent entre leurs
mains la capacité, la responsabilité et ne surent pas en profiter se le feront
réclamer au jour du jugement final, dans le jugement de leur propre vie.
16/07/77, p.133, I-II.
Évolution de la tradition de
l’Église, changement d’attitude
Il est nécessaire d’expliquer en quoi
consiste le Salut. La doctrine actuelle de l’Église authentique inspirée par
l’Esprit saint dit à ce propos : Il ne suffit plus de dire :
« Le Salut de l’âme. » Observez bien, plusieurs personnes
disent : « Du moment que je sauve mon âme, peu importe la façon dont
je vis. » Le problème c’est que tu ne vas pas sauver ton âme seule. C’est
ce que dit le Concile lorsqu’il affirme : « Il ne suffit pas de
sauver son âme. » Il faut sauver l’homme, âme et corps, cœur, intelligence
et volonté. L’homme comme individu et l’homme comme membre d’une société. C’est
la société qu’il faut sauver. C’est tout le monde, disait Pie XII, qu’il faut
sauver de la barbarie pour le rendre humain et de l’humain, le rendre divin.
C’est-à -dire que toutes les coutumes qui entrent en contradiction avec
l’Évangile doivent être éliminées si nous voulons sauver l’homme. Il faut
sauver non seulement l’âme à l’heure de la mort, mais l’homme qui vit dans
l’histoire. Il faut donner à la jeunesse, à l’enfance d’aujourd’hui, une
société, un environnement, des conditions de vie où ils puissent développer
pleinement la vocation que Dieu leur a donnée. Ce n’est pas parce qu’ils sont
pauvres qu’ils doivent demeurer en marge et ne pas faire leur entrĂ©e Ă
l’université. Il nous faut adapter à notre environnement des conditions où la
personne humaine, image de Dieu, puisse participer au bien commun de la
république et bénéficier de ces biens que Dieu a créés pour tous. C’est cela,
la doctrine du Salut. 16/07/77, p.134, I-II.