Le Christ manifeste sa gloire dans le bonheur des hommes.

 

Deuxième dimanche du temps ordinaire; 20 janvier 1980; Lectures : Isaïe 62,1-5; I Corinthiens 12,4-11; Jean 2,1-12.

 

Dans la Parole de Dieu de ce dimanche, resplendit encore l’Épiphanie, écho du mystère de Noël, qui consiste en la venue et en la manifestation de Dieu dans notre histoire.

 

Il veut se faire connaître de tous

 

Trois signes d’Épiphanie : les Rois mages, le Baptême et le premier miracle

 

Dans la liturgie catholique, il y a trois événements de l’Évangile qui se célèbrent en ces dimanches comme autant de manifestations de la gloire du Christ. Le premier fut celui que nous avons célébré le 6 janvier : les Rois mages d’Orient qui sont venus pour adorer Jésus, conduits par une étoile; le second fut celui de dimanche dernier, le Baptême du Christ et le Ciel qui s’ouvre pour dire (Mt 3,17) : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé qui a toute ma faveur. Â» Et le troisième événement est celui de ce dimanche que saint Jean présente précisément comme le premier signe qu’accomplit le Christ pour manifester sa gloire et où les disciples affirmèrent leur foi en Lui. Ici, nous avons aussi l’objectif de ce dimanche : croire davantage en Jésus-Christ, le connaître davantage afin qu’Il soit une véritable épiphanie pour notre foi.

 

Les lectures invitent à l’allégresse

 

Et comme toute épiphanie est une invitation à l’allégresse, le ton de nos lectures s’inspire de cette joie. N’importe qui pourrait dire qu’il s’agit là d’un sarcasme quand au Salvador, alors qu’il y a tant d’afflictions, tant de terreurs, de psychoses, on nous invite à la joie.

Cependant, je crois qu’aucun appel n’est aussi opportun pour notre patrie et pour les Salvadoriens, que l’appel liturgique de ce matin : la joie, l’optimisme.

 

Contexte de la première lecture (Is 62,1-5) : un prophète rompt le silence déprimant de Dieu.

 

Situons-nous dans l’ambiance de Jérusalem alors que le peuple revenait de son désert, après cette épouvantable dépression et ce nombre d’années où Dieu s’est tu. En retournant à Jérusalem, ils retrouvent une patrie détruite, en ruines, comme si tout était mort. Cependant, devant ce silence, devant ces ruines, cette dépression, cette psychose, le prophète élève la voix (Is 62,1-2) : « Ã€ cause de toi Sion je ne me tairai pas; à cause de Jérusalem je ne me tiendrai pas en repos, jusqu’à ce que sa justice jaillisse comme une clarté, et son Salut comme une torche allumée. Alors les nations verront ta justice, et tous les rois, ta gloire. Â»

 

Si nous avons foi en Dieu…

 

C’est l’optimisme de la foi. Dieu a été avec nous, même dans les tribulations et maintenant qu’elles sont passées, pointe l’aurore de l’allégresse, de la libération. Ne soyons pas tristes. C’est la sécurité qu’aujourd’hui, également, l’Église veut semer en nous, à savoir : que Dieu marche avec nous. Noël est un fait réel. Dieu est venu dans l’Histoire. Il veut se faire connaître et cela doit réveiller la foi chez ses disciples.

 

Le Christ est présent aux noces de Cana alors que survient un problème insoluble

 

Voyez comme Marie est sensible également aux problèmes insolubles, comme celui de notre patrie, comme celui qu’elle ressentit : il n’y a plus de vin et ces gens vont sentir la gêne d’une fête qui se prolonge sans la joie qu’il se doit d’avoir, dans une noce réussie. Et comme Marie, au milieu des problèmes qui semblent insolubles, nous tournons notre regard vers le Christ et nous sentons qu’Il est présent comme le dit l’Évangile d’aujourd’hui (Jn 2,1-12) : « Là étaient le Christ et Marie aussi; sa mère était avec Lui. Â»

 

Je voudrais que cette réflexion d’aujourd’hui, de cette nouvelle Épiphanie, nous l’intitulions ainsi : Le Christ manifeste sa gloire dans le bonheur des hommes. Dans la mesure où un homme est heureux, là se manifeste la gloire du Christ. Dans la manière qu’un peuple rencontre les chemins de la paix et de la justice, la fraternité et l’amour, le Christ est glorifié. Le Christ est dans l’Histoire et elle le reflète par le bonheur des peuples.

 

Plan de l’homélie :

 

1) Le Salut sous le signe d’un festin de noces

2) Marie, figure d’une Église riche de charismes et puissante dans son intercession devant Dieu

3) Par la foi, nous partageons l’allégresse de la gloire de Dieu

 

1) Le Salut sous le signe d’un festin de noces

 

A) Saint Jean écrit ce que nous appelons l’Évangile des signes.

 

Pour saint Jean, les miracles que raconte son Évangile, ne sont pas simplement des récits de la thaumaturgie du Christ, ni de sa miséricorde envers ceux qui souffrent. Pour saint Jean il y a quelque chose de plus profond dans chaque miracle et c’est pour cela qu’on l’appelle : « l’Évangile des signes. Â»

 

Les miracles sont des signes qui révèlent le mystère de Jésus

 

Un signe pour saint Jean, dans les récits de l’Évangile, c’est la manifestation de la personnalité et de la mission que le Christ apporta au monde. Sept signes se démarquent dans l’Évangile de saint Jean, sept miracles; et dans chacun d’eux, ce qui importe à saint Jean, c’est de découvrir un nouvel aspect de la personnalité du mystère du Christ.

 

Présageant « son heure Â»â€¦ et le contenu messianique de sa glorification

 

Nous n’allons pas nous attarder aujourd’hui sur les sept miracles, mais sur un seul, le premier signe, que saint Jean met en parallèle avec l’heure de la glorification du Christ (Jn 2,4) : « Femme, mon heure n’est pas encore arrivée. Â» L’heure du Christ est l’expression de son cÅ“ur. Son heure est lorsqu’Il sera cloué sur la croix pour racheter le monde et quand Il ressuscita et fut glorifié par Dieu. Il ne sépare pas la douleur de la gloire. La Croix et la Pâque sont le signe, sont l’heure. Et cette heure chronologiquement, n’est pas encore arrivée quand Marie lui demande un miracle. Par cela le Christ veut nous dire : « Ce que je vais faire maintenant est un présage, une anticipation de mon heure. Je vais manifester ma gloire qui demeurera consommée le jour où Je mourrai sur la croix et celui où Je ressusciterai. Mes miracles vont expliquer ce que signifient cette mort et cette résurrection.

 

 Après cette glorification, Marie, collaboratrice de cette Rédemption, tu auras une part très féconde, très active. Maintenant, nous allons réaliser cette heure, en l’anticipant, mais ce sera seulement lorsque tu prendras toute la portée de ton intercession, de ton rôle matériel dans l’Histoire de l’humanité, que ta part se réalisera pleinement.

 

Le miracle du vin est un signe riche de contenu. Pour le Christ, ce miracle est un signe riche en contenu rédempteur, en contenu messianique.

 

Qu’est-ce que signifie ce signe?

 

En premier lieu, il manifeste que le Christ possède un pouvoir créateur.

 

Qu’Il utilise les éléments de la création avec la même facilité qu’Il dit : « Que l’eau soit Â». Il dit maintenant : « eau transforme-toi en vin. Â» Il peut transformer la nature; c’est un créateur. Cela manifeste la gloire d’un créateur en chair humaine.

 

Ce miracle manifeste une présence capable de résoudre ce qui est humainement impossible

 

Cela manifeste également autre chose : une présence capable de résoudre tous les problèmes. L’angoisse de Marie, exprime l’angoisse de l’humanité : « Il n’y a pas de vin! » Nous pourrions remplacer ce mot par toutes autres nécessités de l’humanité : nous n’avons pas de pain! Nous ne trouvons pas la solution aux problèmes de la patrie! Angoisses de toutes parts! Violence! Désordre! Mais comme Marie, l’angoisse est remplie d’espérance parce qu’elle sent dans la Présence de son Fils, la Puissance de Celui qui peut résoudre ce qui est humainement impossible. Il lui suffit de dire : « Il n’y a plus de vin! » D’exposer le besoin avec une confiance et une foi qui sait que le miracle doit se produire.

 

Ah! Si les Salvadoriens savaient dire à Jésus avec la confiance de Marie, l’angoisse de cette heure, non pas avec pessimisme et désespoir mais avec la confiance d’une impuissance absolue qui se fie totalement en la toute puissance absolue de Dieu : Tu peux tout; je t’expose seulement le besoin; Tu verras ce que Tu dois faire! Marie apparaît si sûre. Malgré une réponse qui semble négative, elle dit aux serviteurs (Jn 2,5) : « Faites tout ce qu’il vous dira. Â»

 

Et la gloire de Dieu se manifeste quand le maître du repas, goûtant le vin si savoureux, dit au marié (Jn 2,10) : « Tout homme sert d’abord le bon vin et, quand les gens sont ivres, le moins bon. Toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à présent! » Si savoureux! Fait directement des mains du Christ! C’est un témoignage d’un pouvoir qui résout, mieux que nous ne l’ayons espéré, les problèmes insolubles.

Ce miracle manifeste la transformation du rite juif de purification, au culte chrétien : le vin, présence de Jésus.

 

Ce signe manifeste donc entre autre chose, une transformation. Chez saint Jean, il y a toujours un sens plus profond qu’il faut rechercher. Il ne faut pas lire l’Évangile de saint Jean superficiellement; il faut l’analyser et quand nous acquérons des connaissances théologiques, nous sentons encore plus de profondeur dans cet Évangile qui est pure théologie.

 

Dans le signe de l’eau contenue dans ces jarres des juifs pour la purification, sans doute que Jean veut nous dire que tout le rituel du judaïsme, toute la loi ancienne va céder sa place au vin qui sera le signe du culte du christianisme. Signe de notre messe : le pain et le vin. Signe d’une religion qui se perfectionne avec la Présence de Dieu parmi nous. Tout cela, et bien davantage encore, pourrions-nous découvrir dans ce signe de la transformation de l’eau en vin.

L’ambiance des noces manifeste le bonheur et la richesse du Salut messianique.

 

Il existe un signe très précieux que nous ne devons pas oublier, et c’est celui de l’atmosphère des noces où Jean a voulu nous raconter ce récit du premier miracle du Christ , de l’ambiance matrimoniale, l’ambiance unique d’un mariage. Tout cela manifeste que le bonheur est la gloire de Dieu. Que ce soit avec la joie d’un jeune marié qui épouse une vierge - comme nous l’a dit la première lecture (Is 62,1-5). Dieu veut que les humains jouissent du bonheur de la Terre, de la joie de vivre, de la félicité d’aimer, de partager, de faire des fêtes. Dieu n’est pas un Dieu triste; c’est un Dieu de fête, de festin, de joie, et dans le cÅ“ur d’un homme qui a la foi, il n’y a pas de place pour le pessimisme.

 

Ainsi l’avait-on annoncé dans l’Ancien Testament

 

Pour mieux comprendre ce signe du mariage, il faut remonter à l’Ancien Testament. C’est pourquoi, afin que nous comprenions mieux l’Évangile d’aujourd’hui, nous avons lu ce passage d’Isaïe. Il s’agit précisément d’un de ces passages qui décrivent les relations de Dieu avec l’humanité sous l’image d’une noce. Qu’il est précieux de savoir que Dieu nous aime comme s’aiment les jeunes époux!

 

Jérusalem, abattue, entre dans une nouvelle étape qui nous est décrite comme l’intimité nuptiale (Is 62,3) : « Tu seras une couronne de splendeur dans la main de Yahvé. Â» dit-Il à Jérusalem qui est comme un symbole de l’humanité que Dieu aime pour la racheter.

 

C’était de coutume que les rois se couronnent parfois avec des couronnes qui simulaient les murailles de leur cité et, ici, apparaît Dieu faisant sa couronne des murs de Jérusalem (Is 62,3) : « â€¦. diadème royal dans la main de Yahvé. Â» Voyez comment, pour Dieu, la gloire est le bonheur des hommes. Comme si nous étions - quelles folies que celles de Dieu! - sa couronne, nous sommes le sommet de son bonheur. Il nous crée afin de se réjouir de notre bonheur. (Is 62,4-5) : « On ne te dira plus : « Délaissée Â» et de la terre on ne dira plus : « Désolation Â». Mais on t’appellera : « Mon plaisir est en elle Â» - l’affection qu’un homme sent pour son épouse - « et ta terre : « Ã‰pousée Â». Car Yahvé trouvera en toi son plaisir, et ta terre sera épousée. Comme un jeune homme épouse une vierge, ton bâtisseur t’épousera. Et c’est la joie de l’époux au sujet de l’épouse, que ton Dieu éprouvera à ton sujet. Â» Le bonheur de Dieu coïncide avec le bonheur humain.

 

Je voudrais tirer de cela la conclusion suivante, à savoir : que notre religion est un festin.

 

Nos réunions de messes dominicales devraient se caractériser par la joie de ce contact avec ce Dieu qui nous aime. Nous devrions chanter, nous devrions participer. Cette sortie du temple pour moi est une inspiration : celle de l’allégresse, de l’amour, de l’affection avec laquelle nous nous saluons et que nous exprimons avant de nous en aller chacun chez soi.

 

Je voudrais aussi tirer cette autre conclusion. C’est que chaque mariage doit être le signe de cette allégresse de Dieu parmi les hommes. Il ne devrait pas y avoir d’amertume entre l’époux, l’épouse et les enfants. Il devrait régner une telle concorde, une telle allégresse et un tel amour qu’en voyant une famille nous pensions tous : Comme Dieu est grand quand Il est capable de former des cellules comme celle-ci! Quand on voit, en vérité, par exemple, une famille qui va se promener, qui marche ensemble, c’est la joie de Dieu qui se reflète sur Terre; c’est le grand mystère du mariage. Un « grand mystère Â» dit saint Paul. Je le dis du Christ et de l’Église, de tout homme et de toute femme qui se marient et qui ont des enfants; ils sont Église. C’est le Christ, c’est l’Église, c’est la communauté, c’est la famille de Dieu qui se reflète dans la famille de la Terre. Le Salut, donc, sous le signe d’un festin de noces. 20/01/80, p.161-164, VIII.

 

2) Marie, figure d’une Église riche de charismes et puissante dans son intercession devant Dieu

 

A) En suivant la symbolique, les symboles de l’Évangile de Jean, Marie n’est plus simplement ici la mère de ce Jésus. Marie apparaît dans toute la riche symbolique de ce passage, comme l’image de l’Église.

 

Saint Jean veut nous présenter ici, en Marie et Jésus, la relation de Jésus avec l’Église. C’est une des choses les plus belles que notre Concile Vatican II ait faite, d’avoir couronné ses réflexions sur l’Église, dans le chapitre sur « Marie Mère de l’Église Â», en faisant consister tout le travail ecclésial - pastoral, missionnaire, catéchistique,- à faire des hommes semblables à Marie. Placez Marie comme but et inspiration de tout le travail ecclésiastique, parce qu’Elle est le modèle de l’Église que nous nous efforçons de construire.

 

La Mère de Jésus était là… où était Jésus

 

Marie est présente où se trouve Jésus. Jamais nous ne pourrons rencontrer Marie séparée de Jésus. Vouloir un christianisme sans Marie, c’est enlever la pierre précieuse à un anneau d’or. Vouloir un Christ sans Marie, c’est vouloir un enfant sans les bras de sa mère. Un Noël sans Marie n’a pas de sens. De même, au pied de la croix… un mort abandonné, sans affection des bras maternels pour le recueillir après la crucifixion.

 

Marie est indispensable; elle n’est pas divine; ce n’est pas une déesse, ni une rédemptrice, mais c’est quelqu’un qui collabore si intimement avec Dieu que nous ne pouvons nous en passer. C’est pourquoi, l’Évangile d’aujourd’hui est si beau lorsqu’il dit (Jn 2,1-2) : « La mère de Jésus y était, ainsi que Jésus et ses disciples » Une seule chose : Jésus, Marie et tous les chrétiens.

 

Intercession confiante

 

Un autre signe de la présence de Marie, c’est son intercession confiante. Notre prière gagne tant quand nous la déposons entre les mains de Marie! Et nous-mêmes alors, nous sommes comme Marie, nous sommes l’Église. Quelle école de générosité que ce sens communautaire quand nous prions les uns pour les autres, quand nous disons à Jésus, comme lors de l’affliction de la noce : « Il n’y a plus de vin! », quand nous sommes préoccupés de demander davantage pour les autres que pour nous-mêmes!

 

La réponse de Jésus n’est pas un rejet, mais l’expression du signe de Marie

 

La réponse de Jésus apparaît également comme un mystère : « Femme! Â» Il ne s’agit pas là d’un manque de respect; c’était la façon dont les orientaux disaient Madame. Cela signifie aussi quelque chose de plus profond; cela veut dire Ève! Cela veut dire la mère des vivants! Autrement dit, cet être merveilleux que Dieu a fait pour que, de ses entrailles, Il vienne à la vie humaine! Pour le Christ, Marie est bien davantage qu’une mère physique. Elle est la mère créée par Dieu pour engendrer spirituellement tout une humanité divine. « Femme Â» signifie, celle qui allait être la compagne de la fécondité et qui va peupler la Terre comme Adam au paradis appela Ève.

 

« Que me veux-tu? Â»â€¦ ma relation principale est avec le Père

 

De même, cette réponse mystérieuse : Que me veux-tu? Il ne s’agit pas, encore une fois, d’un mépris, mais d’une révélation profonde de ce qu’est la relation entre le Christ et Marie; c’est une relation subordonnée à une volonté supérieure. Cette réponse s’apparente à celle que l’Enfant Jésus fit à Marie au temple quand elle le perdit (Lc 2,49) : « Pourquoi donc me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père? » Que devons-nous faire, toi et moi, sinon obéir au Père? L’heure, qu’il désigne, fait référence à l’heure des miracles, et non à celle que tu me demandes. C’est à dire, la relation de l’Église avec Jésus, obéissant à l’heure du Père, de l’Église collaborant avec Jésus dans l’obéissance à Dieu. C’est cela, le plus grand. Marie ne s’interpose pas pour détourner les plans de Dieu, mais, elle est l’esclave du Seigneur; et si elle collabore avec le Christ, ce ne sera pas toujours en fonction de mère et de fils, mais de créature pour son Créateur, obéissant toujours à la volonté du Père.

 

Mon heure…

 

Et quand le Christ lui dit (Jn 2,4) : « Mon heure n’est pas encore arrivée, Â» Il lui signifie : « C’est ton heure également qui va arriver. Quand je serai glorifié, ta mission aussi sera glorifiée et si maintenant nous anticipons cette heure par un miracle, c’est parce que nous allons donner un signe de ce que sera la perpétuité de l’histoire de l’Église. Tu seras toujours en cette heure où j’ai racheté le monde, ma plus intime collaboratrice. Tu obtiendras de mes mains, toute la grâce dont l’humanité a besoin. Â»

 

Voyez-vous comment est cette réponse, ce dialogue mystérieux entre Marie et Jésus qui nous ouvre les horizons d’une profonde Mariologie, mais aussi d’une ecclésiologie, que saint Jean nous révèle? C’est un signe de tant d’espérance pour nous

 

L’attitude de Marie : confiante et active

 

L’attitude de Marie doit être notre attitude d’Église : confiante mais active. Prier comme si tout dépendait de Lui, mais travailler comme si tout dépendait de nous. Ainsi, aussitôt après avoir fait cette requête à Jésus, Marie s’en va dire aux serviteurs : « Faisons notre part, remplissons les jarres, obéissez à ce qu’Il vous dira de faire. Â» Un miracle ne peut se réaliser en espérant tout de Dieu; il faut faire notre part, tout ce qui est à notre portée. Le miracle suppose donc l’action. Marie est la conjugaison merveilleuse de la foi et de l’agir. C’est ce que doit être chaque chrétien également : une conjugaison merveilleuse de la foi et de l’agir. C’est ce que doit être aussi chaque catholique : une conjugaison merveilleuse de la foi qui met en Dieu toute sa confiance et une conjugaison également des valeurs humaines. Croire fait aussi partie de mon agir humain, et il est nécessaire d’avoir confiance également aux êtres humains. 20/01/80, p.164-166, VIII.

 

B) Relation charismatique de Marie-Église avec Jésus

 

Marie est la plénitude des charismes

 

Dans la seconde lecture d’aujourd’hui je veux rencontrer ce que j’appelle : Marie, figure d’une Église riche en charismes.

 

 

Paul VI à Fatima = Plénitude hiérarchique et plénitude charismatique

 

La hiérarchie est constituée par le Pape, les évêques, les prêtres, par tous ceux qui portent une mission de Celui qui a dit : « Ainsi, comme mon Père m’a envoyé, Je vous envoie. Â» Et le charisme est tout cet ensemble de qualités qui surgit du Peuple de Dieu et que l’autorité hiérarchique évalue et ordonne pour le bien commun.

 

Charisme et hiérarchie ne peuvent être séparés

 

Marie n’appartient pas à la hiérarchie, Marie ne fut pas choisie pour être Pape, Marie ne fut pas placée par le Christ pour être prêtre et célébrer les sacrements. Marie demeura comme vous, très chères femmes, une femme du peuple. Mais Marie eut autre chose et c’est la richesse des charismes. Charismes avec toutes les grâces que Dieu donne à une personne pour qu’elle soit utile à l’ensemble de la communauté. Marie est le modèle de tous les êtres humains qui ont besoin de charismes pour servir la communauté. C’est pourquoi nous voyons en Elle, nous les évêques, le modèle de la pastorale; les époux, le modèle de l’amour matrimonial; les jeunes, la joie de la jeunesse; les enfants, la confiance d’une mère.

 

Marie est tout ce dont l’Église a besoin dans son aspect charismatique. C’est pour cela que Marie ne peut être absente d’aucun cÅ“ur, d’aucun foyer; nous en avons tous besoin. Elle ne possède pas de pouvoir hiérarchique comme en avait saint Pierre : pouvoir de pardonner les péchés, pouvoir de célébrer la messe. Marie ne les avait pas. Ces pouvoirs hiérarchiques, Dieu les canalise pour un service officiel : l’Église institution. Nous ne devons pas la déprécier parce que le Christ a voulu ces canaux officiels de l’institution hiérarchique pour avoir une Église unie en communauté, mais cette autorité ne servirait à rien si l’Esprit qui a donné des vocations pour que certains soient prêtres, n’avait pas donné également les charismes pour que dans le Peuple de Dieu nous rencontrions ce que je vois en ce moment : une foi merveilleuse qui m’écoute, une bonne volonté de l’Esprit Saint pour mettre en Å“uvre ce que nous prêchons. C’est tout cela les charismes. Vous faites vivre la Parole que je prêche parce que vous l’apportez de la hiérarchie, du magistère, à la vie, au charisme, au monde.

 

Marie est donc ce précieux signe de l’épître (I Co 12,4-11) que nous avons lue aujourd’hui et que je vous supplie de méditer beaucoup parce que je crois qu’ici se trouve la ligne à suivre pour résoudre aussi nos problèmes nationaux. Il est certain que saint Paul nous parle de la communauté chrétienne, de ce que nous avons tant distingué. Le Peuple de Dieu est distinct du peuple naturel; c’est le peuple des baptisés, de ceux qui constituent l’Église; de là, dérive également un éclairage pour le peuple naturel.

 

Je vous ai raconté comment au début de l’Europe, les monastères bénédictins furent le modèle de la civilisation. Les moines dans leurs monastères, vivaient avec un sens si équilibré de l’autorité et de la liberté, que pareillement se constitua la société. Ils copièrent ces communautés chrétiennes; ce que fut la civilisation du monde occidental.

 

Si également au Salvador, les chrétiens se proposaient de construire de véritables communautés, Peuple de Dieu, inspirées dans la foi, illuminant en espérance, encourageant par un amour fraternel, fils d’un même Père! Ces communautés religieuses ou de base, communauté de chrétiens, donneraient l’exemple, seraient le modèle, le projet, pour organiser la société du Salvador.

 

L’Esprit et la diversité des charismes

 

Comment ne pourrait-elle pas être le modèle d’une nation, une Église qui mettrait en pratique ce dont saint Paul nous a dit aujourd’hui? (I Co 12,4-7) : « Il y a certes, diversité de dons spirituels, mais c’est le même Esprit; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur; diversité d’opérations, mais c’est le même Dieu qui opère tout en tous. À chacun la manifestation de l’Esprit est donnée en vue du bien commun. Â»

 

Un exemple d’attitude : le pluralisme qui converge en unité du bien commun

 

Observez : quel principe plus sage, « en chacun se manifeste l’Esprit pour le bien commun. Â»! Nous ne servons pas tous à tout, mais nous servons tous à quelque chose. Et cet ensemble de choses, constitue le bien commun quand nous recevons de l’Esprit les qualités que nous avons pour les mettre au service du bien commun (I Co 12,8) : « Ã€ l’un c’est un discours de sagesse qui est donné par l’Esprit; à tel autre un discours de science, selon le même Esprit, à un autre la foi, etc. Â» et saint Paul énumère les divers charismes, mais il termine en disant (12,11) : « Mais tout cela, c’est l’unique et même Esprit qui l’opère, distribuant ses dons à chacun en particulier comme il l’entend. Â»

 

Frères, je vous appelle aujourd’hui au « pluralisme Â»: manières de penser distinctes, projets politiques distincts, options distinctes. Mais le plus beau c’est que chacun, selon ses options, cherchera le bien commun; nous construirons selon les dons que nous avons reçus de l’Esprit, la patrie commune en mettant en commun ce que chacun a reçu. Quelle solution merveilleuse nous donne aujourd’hui la Parole du Seigneur pour que nous vivions non seulement en une Église unie dans l’Esprit, en servant ce même Seigneur, mais pour que nous soyons également l’exemple d’un pays. Lamentablement, c’est avec honte que je dois dire que, même comme Peuple de Dieu, nous ne sommes pas unis. Mais c’est le travail de tous. Que chacun sache utiliser ses dons ou, du moins, qu’il ne soit pas une cause de division. Que les dons que chacun a reçus, qu’il les donne avec générosité au service des autres; et si les autres ne veulent pas recevoir, ce sera leur faute; mais pour ma part, je sais que j’ai tout reçu du Seigneur pour le donner aussi au service de tous. 20/01/80, p.167-169, VIII.

 

3) Par la foi, nous partageons l’allégresse de la gloire de Dieu

 

Objet de l’Épiphanie = « Il manifesta ses signes… et croissait la foi de ses disciples. Â»

 

Je termine ma réflexion avec cette dernière pensée par laquelle se termine l’Évangile d’aujourd’hui en disant (Jn 2,11) : « Tel fut le premier des signes de Jésus, […] Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en Lui. Â» C’est ce que j’aimerais dire de tous ceux qui ont partagé cette réflexion avec moi. Que notre foi en Lui a grandi, que s’est accru notre sens de l’Église, qu’a crû notre sens national également ; que nous allons sortir de notre réflexion d’aujourd’hui avec la joie et l’optimisme que le Christ voulut donner comme caractéristiques à son premier signe : l’allégresse d’un festin, la confiance dans les moments difficiles et la joie de collaborer aussi avec Lui.

 

Les disciples de Jean-Baptiste ont surmonté l’étape de l’Ancien Testament

 

Bon nombre des disciples du Christ étaient d’anciens disciples de Jean-Baptiste. Jean-Baptiste est parvenu jusqu’aux limites de l’Ancien Testament, mais maintenant ces hommes, que Jean donna au Christ, ont découvert en ce dernier que Dieu est présent dans l’Histoire. Ils croient au Christ comme en un Dieu puissant; ils croient en Lui comme le Sauveur de Dieu, le Jésus Salut du Seigneur. Ils ont vu et saint Jean va l’écrire après avec une nostalgie profonde : « Nous avons vu sa gloire de Fils unique du Père, rempli de grâce et de vérité. Nous avons mangé avec Lui, nous L’avons touché. Â» Quel témoignage merveilleux devrions-nous porter comme chrétiens : nous le connaissons, nous savons qu’Il existe dans l’Histoire, Il nous a entretenu à la messe ce matin, Il nous a enseigné, Il nous a rempli d’optimisme! Nous irions porter partout cette gloire du Seigneur qui est de croire en Lui et aussi de faire notre part, ce que nous nous devons de faire. Cela fait appel à notre attitude chrétienne : un sens de confiance et une responsabilité dans le travail. Il n’existe pas de problème insoluble que le Christ ne puisse résoudre. Ce dont nous avons le plus besoin en ce moment, plus que tout, ce sont des hommes et des femmes qui placent toute leur confiance en Jésus-Christ et qui travaillent de toute leur ardeur pour la patrie… 20/01/80, p.169-170, VIII.